mardi 8 janvier 2013

En crachant du haut des buildings


"Dans le snack de la 12e Avenue où j'avais l'habitude de boire mon café le matin et où beaucoup de chauffeurs de chez Rodney prenaient leurs repas, ils avaient une nouvelle serveuse, Betty. Elle faisait à peu près ma taille - un mètre soixante ou soixante-deux -mais elle pesait facilement deux cents kilos. Je m'aperçus qu'elle avait même du mal à se déplacer derrière le comptoir, tellement elle était grosse. Elle était obligé d'avancer de côté, comme un énorme crabe, pour arriver à servir ses clients.
La deuxième fois que je la vis, je ne parvins pas à détourner les yeux d'une pareille énormité. Je ne pus m'empêcher de l'étudier sous toutes les coutures. Comment se fait-il, pensai-je alors, comment se fait-il par Jésus-Christ troué de partout, que Milt ait engagé ce tas de merde à face de truie cette chose absurde et répugnante ?"  Extrait du livre de Dan Fante  "En crachant du haut des buildings" 



Dans cet extrait qui me fait particulièrement marrer, Dan Fante est en crise aigüe de trop plein. Il ne déteste pas la vie, mais il n'accepte plus ce qu'elle lui propose. Il n'accepte plus non plus de se faire exploiter dans des boulots de merde, il en a assez du laisser aller des personnes qu'il croise, des appareils téléphoniques qui ne fonctionnent jamais comme il faudrait, de la connerie ordinaire etc etc... L'alcool calme parfois ses pensées et le manque les excitent. C'est compliqué.

Mais tout comme son père John Fante (à droite) il n'y va pas avec le dos de la cuillère. On retrouve chez lui cette même forme, bien que différente, cette réflexion vivante et sans crainte de se livrer, et bien que ses pensées vont parfois très loin, on y retrouve la même pudeur, et la même tendresse. 



1 commentaire:

  1. C'est le manque de dignité des autres qui souvent révolte. Dan Fante ne le sait que trop bien, c'est ce qui le rend sauvage.
    Hugo

    RépondreSupprimer